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Selon l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, « toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ». Sous certaines circonstances, ce droit peut être remis en cause pour des questions de sécurité, notamment en faisant appel à la détention provisoire, soit la pratique d’incarcérer une personne en attente de jugement pour des raisons spécifiques. Posant des problématiques évidentes, son usage doit toutefois rester exceptionnel. Pourtant, en France, son recours est de près de 30%. Est-il réellement possible de qualifier un taux pareil d’exception ? Ce policy brief cherche à explorer les manières dont la détention provisoire peut être excessivement utilisée par la justice française. Il a également pour but de mettre en lumière les conséquences, pour les prévenu.e.s concerné.e.s et pour l’entièreté de la population carcérale, d’un tel usage. Pour finir, cet article cherche à dessiner plus clairement des pistes pour un recours concrètement exceptionnel à la détention provisoire.

Introduction

Au 1ᵉʳ juin 2023, la population carcérale française était composée à 27,7% de prévenu.e.s1, soit des personnes en attente de jugement. Iels ont été placé.e.s sous la responsabilité du système pénitentiaire suite à leur placement en « détention provisoire », un terme s’étant institutionnalisé dans les années 70, bien qu’il s’agissait déjà auparavant d’une pratique fréquente. Cette mesure consiste à, exceptionnellement, incarcérer certaines personnes avant leur comparution en procès. Son utilisation est régie et limitée par différentes règles instaurées progressivement suite à de multiples accusations d’une mesure injuste allant à l’encontre de la présomption d’innocence.

Il est important de noter que la détention provisoire est une pratique qui se retrouve dans la large majorité des systèmes judiciaires et pénitentiaires nationaux à travers le monde. Son importance peut être cruciale, voire vitale, car elle peut jouer un rôle clef dans le bon déroulement du procès ou dans la protection des personnes y étant connectées. Toutefois, puisqu’elle représente une violation massive des droits fondamentaux universels, notamment celui de la présomption d’innocence, il est absolument nécessaire que son utilisation reste encadrée de manière stricte.

Les Français.es en détention provisoire représentent, aujourd’hui, plus d’un quart des personnes incarcérées, dans un système déjà surchargé, car surpeuplé. Cette statistique relève-t-elle réellement de l’exception ? Cet article analyse la manière dont la justice française se repose sur la détention provisoire comme un outil commun, ce qui peut se traduire par un usage abusif du dispositif. Il discute également des problématiques entachant les droits humains des prévenu.e.s qui entourent son usage, tant quant à la logistique, à la santé des personnes concernées ou encore aux discriminations.

Les contours du dispositif de détention provisoire

La détention provisoire, héritière de la détention préventive, concerne l’emprisonnement des personnes qui n’ont pas encore été jugées, et intervient donc avant le procès. Ses débuts, dans les années 70, sont tumultueux et aboutissent en conséquence sur une série de réformes. En effet, depuis sa création, le dispositif est controversé pour sa définition du terme « exceptionnel » : les taux de détention provisoire étaient, en 1980, de 42.94% et de 42,22% en 19802, des taux faramineux puisqu’il est impossible de définir près de la moitié de la population carcérale comme « exceptionnelle ». Qui plus est, les durées des placements en détention provisoire semblent s’étendre, passant d’en moyenne 2,9 mois en 1980 à 3,8 mois en 19903. D’ores et déjà, il est clair que le dispositif de détention provisoire nécessite énormément d’encadrement s’il veut pouvoir exister, et s’il se veut respectueux des droits communs à tou.te.s.

Aujourd’hui, ses conditions d’utilisation sont régies par l’article 144 du Code de procédure pénale qui dessine son usage comme tel :

« La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique :

  • Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;
  • Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;
  • Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;
  • Protéger la personne mise en examen ;
  • Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;
  • Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;
  • Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire. Toutefois, le présent alinéa n’est pas applicable en matière correctionnelle. »4

L’élément clef de sa définition est évidemment le fait que la détention provisoire doit être, lorsque utilisée, inévitable, comme une sorte de dernier recours pour s’assurer du déroulement d’un procès dans les meilleures des circonstances. Son utilisation est encore davantage restreinte par le fait qu’il ne s’agit pas d’un dispositif pouvant être déployé sur n’importe quelle personne mise en examen. En effet, selon l’article 143-1 du Code de procédure pénale, seul.e.s les individu.e.s mis.es en examen pour un crime, ou pour un délit encourant une durée d’emprisonnement supérieure à trois ans, peuvent être placé.e.s en détention provisoire5

Le placement en détention provisoire peut découler de trois statuts juridiques différents. Il est possible, dans un premier temps, d’être incarcéré.e en tant que prévenu.e dans le cadre d’une instruction, soit la phase durant laquelle le.a juge d’instruction enquête sur l’affaire et les faits avant de pouvoir juger le.a prévenu.e6. Pourtant, les prévenu.e.s se retrouvent en détention dans le cadre d’une comparution immédiate. Une comparution immédiate est définie comme « une procédure rapide qui permet au procureur de faire juger une personne tout de suite après sa garde à vue. Le procureur de la République peut engager cette procédure s’il estime que les indices sont suffisants et que l’affaire est en état d’être jugée »7. A été ajoutée à cette liste, en 2019, la comparution à délai différé, utilisée dans des affaires dans lesquelles les indices sont jugés suffisants, mais certains résultats d’enquête restent manquants. Cette procédure « permet de faire juger une personne suspectée d’un délit dans un délai de deux mois après sa garde-à-vue »8. Cette dernière semble pouvoir avoir son effet pervers non négligeable sur le taux de détention provisoire, puisqu’en un an uniquement, son utilisation a augmenté de 38%9. En créant un énième moyen d’être placé en détention provisoire, le gouvernement français démontre son indifférence face à l’usage abusif de cette mesure.

Le placement en détention provisoire est un régime couvert par l’article 5.3 de la Convention européenne des droits de l’Homme, selon lequel « toute personne arrêtée ou détenue […] doit aussitôt être traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure »10, refusant alors toute durée pouvant être considérée comme déraisonnable. Comment donc comprendre la durée d’un placement en détention provisoire en France ? Celle-ci, déterminée par le.a juge des libertés et de la détention (JLD) en charge de l’affaire sur décision justifiée, varie en fonction de la nature de l’infraction et de la complexité des investigations nécessaires, selon les normes établies par les articles 145-1 et 145-2 du Code de procédure pénale. S’il s’agit d’un délit, la durée normale de détention provisoire est de quatre mois, lorsque la peine encourue est inférieure ou égale à cinq ans. Ce délai peut être étendu, de manière exceptionnelle, de quatre mois, si le.a JLD l’estime nécessaire pour le maintien de l’ordre comme décrit dans l’article 14411. Concernant les crimes, la norme semble varier selon les différentes situations décrites. Le temps passé en détention provisoire est supposé être généralement d’un an, ou deux ans lorsque la peine est inférieure ou égale à 20 ans de réclusion criminelle. Dans le cas d’un crime commis hors du territoire français ou d’autres types de crimes spécifiques comme décrits dans l’article 145-2, la détention provisoire peut être portée jusqu’à quatre ans. Tout comme pour les délits, le.a JLD peut prendre la décision d’étendre la durée du placement, sur une durée ne pouvant être supérieure à six  mois12

Il est important de souligner que le temps passé en détention provisoire est décompté de la peine de prison si le.a prévenu.e est trouvé.e coupable et incarcéré.e à la suite de son procès. Le mécanisme en détention provisoire présente davantage de lacunes dans une situation où le.a prévenu.e est innocenté.e à la suite de son procès, notamment, car il constitue une violation flagrante du principe de présomption d’innocence. Ce.tte dernier.ère est alors éligible à des indemnisations pour tout préjudice moral ou matériel ayant pu être causé par le placement en détention provisoire. Ce principe d’indemnisation est toutefois entouré par une multitude de règles sur l’éligibilité, mais aussi sur les frais pouvant être couverts, précisant particulièrement qu’un.e individu.e ayant été amené en procès pour protéger la personne ayant commis l’infraction ne peut percevoir de réparations13. Ainsi, ce sont 86% des demandes de réparations traitées en 2022 qui ont été acceptées par le ministère de la Justice14. Néanmoins, la justice ne semble pas capable de traiter les demandes aussi vite qu’elles sont émises : face à 547 demandes traitées en 2022, il en restait encore 735 au 31 décembre 202215. Cela peut, sans doute, pointer ce qui paraît être un usage abusif de la détention provisoire de la justice française.

Ainsi, si le droit derrière la détention provisoire en détermine l’exception comme la règle, est-il réellement applicable de considérer son usage comme exceptionnel ?

Quel usage en réalité ?

D’exception à généralité ?

En France, en 2019, le pourcentage de détenu.e.s en détention provisoire était de 29% de la population carcérale totale, parmi lesquels 80% étaient en attente de jugement, et 20% étaient déjà jugés et en attente de l’examen de leur recours contre leur condamnation. En revanche, le taux moyen de détention provisoire parmi les pays Membres du conseil de l’Europe s’élève à 25,9%16. Sous de telles circonstances, la France se place sous la moyenne, mais n’est pourtant pas dernière de classe : le taux de détention provisoire dans les établissements pénitentiaires en Suisse est notamment de 47,7%17, représentant alors près du double de la moyenne européenne. Toutefois, il semble intéressant de souligner que la situation de la France n’apparaît pas évoluer à travers les années. Effectivement, en 2011, elle se plaçait déjà en dessous de la moyenne (un taux de détention provisoire de 27,7% en France pour une moyenne européenne de 24,7%18), ce qui suggère alors que l’évolution de la situation quant au mécanisme de détention provisoire en est à un point mort. Cela pourrait ainsi peut-être être justifié par un budget français dédié à la Justice, ramené par habitant.e parmi les plus faibles au sein de l’entièreté du Conseil de l’Europe, tandis qu’elle compte parmi les plus gros budgets19.

Le caractère à apparence décroissante du taux de détention provisoire (28,9% au 2021/03/01, 27,7% en 2022/03/01, et 26,8% au 2023/03/0120) peut porter à confusion quant à la situation en France. Pourtant, il paraît clair qu’il s’agit en réalité plutôt d’une statistique stagnante, dû à un pourcentage de prévenu.e.s incarcéré.e.s qui semble, récemment et de nouveau, augmenter (27,7% au 2023/06/0121). Qui plus est, en regardant l’évolution sur la dernière décennie, il est réellement possible d’établir un portrait du niveau d’usage moyen de détention provisoire en France : la seule réelle baisse en pourcentage de prévenu.e.s, attribuée à l’année 2020, correspond à la période de la COVID-19, durant laquelle la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP) s’est vu obligée de baisser les taux de sur-occupation dans leurs établissements pénitentiaires pour des questions de santé publique. En effet, en un an, la justice française a réussi à faire chuter le nombre de prévenu.e.s incarcéré.e.s de 15,3%22, passant de 70 651 au 1ᵉʳ janvier 2020 à 58 695 au 1ᵉʳ janvier 202123, preuve qu’un usage moins fréquent de la détention provisoire est réalisable. Ces efforts semblent cependant être rapidement abandonnés, puisque, pas plus tard qu’au 1ᵉʳ février 2021, le nombre de prévenu.e.s incarcéré.e.s avait déjà augmenté, étant de 18 65924. Cette baisse correspond également à l’apparition juridique de la distinction de « condamné.e – prévenu.e »25, qui a permis la re-catégorisation des personnes écrouées en France. Dans un système carcéral où surpopulation est maître du jeu, il n’est pas possible de justifier des taux de détention provisoire aussi hauts ni le fait qu’ils ne paraissent pas évoluer. En effet, par leur seule incarcération, la présence des prévenu.e.s met sous pression le système pénitentiaire français, contribuant à l’aggravation des conditions de détention pour l’entièreté de la population carcérale. 

La surveillance du système de détention provisoire avait été placée, en 2000, à la suite de la loi sur la présomption d’innocence, dans les mains la Commission de suivi de la détention provisoire (CSDP), qui avait alors pour responsabilité d’analyser les données relatives au mécanisme, en France et à l’international. Expert en la question, l’organisme dénonçait « l’extraordinaire et persistante incapacité, qui défie l’entendement, de l’appareil statistique à appréhender le phénomène de la détention  provisoire »26. Iels expliquent que, le ministère de la Justice étant la seule source de statistiques et informations quant à la détention, un mystère total entoure la progression concrète du nombre de prévenu.e.s sous écrou27. En effet, il est notamment difficile d’estimer la part de prévenu.e.s incarcéré.e.s pour de courtes périodes28, particulièrement dans le cadre de la comparution immédiate : iels auraient été plus de 30 000 à avoir été jugé.e.s en comparution immédiate en 2021, ne passant alors que quelques jours en détention provisoire29. Leur passage en détention étant bref et les statistiques de la DAP ne montrant les taux d’habitation de ses établissements à des moments précis, leur inclusion dans les recensements reste une question à laquelle il n’est pas possible de trouver de réponse. 

Pourquoi autant de brouillard entoure le phénomène de détention provisoire ? Le président de la CSDP, Bruno Aubusson, y trouve une explication : « La détention provisoire n’est plus, depuis quelques années, un sujet auquel la chancellerie prête attention »30. Cet abandon de la problématique de la détention provisoire semble être confirmée par la dissolution de la CSDP, à la suite de la loi du 7 décembre 2020. Le gouvernement estime dès lors le rôle du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) comme suffisant pour répondre aux problématiques relevant anciennement de la juridiction de la CSDP, ajoutant que le ministère de la Justice pourrait également remplir les missions de la commission31. Pourtant, depuis, aucun pouvoir ne paraît s’être réellement saisi de la question et des enjeux de la détention provisoire32, énième preuve de l’indifférence de l’administration publique. Son inaction se traduit aussi dans ses actions, qui dénotent de son discours car « d’un côté, le législateur se plaît à rappeler que la détention provisoire doit être exceptionnelle, mais de l’autre, il multiplie sans cesse les possibilités de la prononcer »33. Un exemple notoire est le durcissement des peines dans le cadre du trafic de cigarettes, dont la vente à la sauvette n’était punie que d’un an, mais qui est, depuis décembre 2022, passible de trois ans d’emprisonnement, faisant de ce délit une infraction passable par la détention provisoire. En devenant une justice plus pénalisante, le gouvernement français ne fait qu’étendre, en permanence et de manière de plus en plus ouverte, le champ d’application de la détention provisoire34, en faisant donc une mesure commune plutôt qu’exceptionnelle.

Une provisoire sans fin ?

Les efforts pour réduire les taux de détention provisoire se heurtent à un phénomène contraire à celui-ci : l’allongement de sa durée. La catégorie des prévenu.e.s au sein de la population carcérale est majoritairement constituée par les personnes concernées par des instructions, la comparution immédiate étant bien plus difficile à quantifier, car bien plus courte. Ce sont donc aussi ces personnes qui sont alors concernées par les délais d’attente à rallonge. Ainsi, même si la justice semble prétendre utiliser la détention provisoire de manière moins régulière, « la baisse des entrées en détention provisoire s’accompagne de l’augmentation continue de la durée de celle-ci, qui efface les effets de la baisse des flux »35. Ainsi, pourquoi les prévenu.e.s sujet.te.s d’instructions sont-iels face à une détention provisoire pourtant sans fin ?

La justice française paraît être à la traîne avec des délais d’instruction toujours plus longs. En effet, si, en 2010, une instruction prenait moyennement 6,5 mois pour un délit et 24,3 mois pour un crime, ces mêmes délais, en 2018, étaient respectivement de 8 mois et 30,5 mois36. Derrière cela se cache une réelle surcharge du système d’instruction, qui dispose de moins de moyens que nécessaire pour garantir des instructions rapides et efficaces. Certain.e.s magistrat.e.s, étant traditionnellement, selon le ministère de la Justice, supposé.e.s gérer 72 dossiers d’instruction, dénoncent cette hyperstimulation du système, qui les mènent à devoir travailler sur plus de 130 dossiers à la fois37. Bien que ces dossiers, concernant des prévenu.e.s placé.e.s en détention provisoire, sont traités de manière prioritaire, leur traitement peut facilement prendre près de deux ans. Cette surcharge peut notamment être attribuée, selon les syndicats, au fait que le budget dédié à la justice se concentre davantage sur les enjeux de maintien de l’ordre, mais en oublie de fournir, également, des moyens permettant d’enquêter plus loin que l’interpellation38. Dédier plus d’argent au meilleur développement des cabinets d’instruction pourrait permettre de pallier leur sous-effectif et donc, intrinsèquement, de baisser les durées passées en détention provisoire. Cependant, la faute ne retombe pas entièrement sur les cabinets d’instruction. Dans le cadre de leurs enquêtes, il est très fréquent que les magistrat.e.s émettent une demande d’expertise psychiatrique, particulièrement pour juger de la capacité de discernement de la personne concernée. Toutefois, iels reportent « une pénurie d’experts-psychiatres à l’échelle nationale, les délais sont catastrophiques »39. Face à un tel mépris quant à la situation du système de santé de la DAP, les délais d’attente des expertises continuent de s’étendre, dépassant parfois même les douze mois d’attente, un état de choses qui gèle complètement l’avancement de l’instruction et ainsi, la sortie de détention provisoire. 

Malheureusement, le manque de moyens et financements ne touche pas seulement les cabinets d’instruction. En effet, l’Autorité de régulation et de programmation des extractions judiciaires (ARPEJ), dépendante de la DAP et de ce fait du ministère de la Justice, souffre aussi désespérément de manque de moyens, étant notamment en sous-effectif. Or, il en relève, depuis 2019, de leurs compétences et de leur responsabilité d’organiser l’extraction de détention des prévenu.e.s convoqué.e.s pour comparution du tribunal. Ainsi, si avant 2019 ce processus n’avait jamais réellement présenté de problèmes, les extractions sont désormais annulées à répétition, étendant davantage les délais de détention provisoire, et ce, de plusieurs mois40. Pour pallier cela, les juges et magistrat.e.s sont contraint.e.s de se replier sur la « visio-audience », une pratique existant depuis les années 90 déjà, mais largement popularisée lors de la crise sanitaire de la COVID-19. Toutefois, il est très important de souligner que cela pose des problématiques particulières dans le cas de la défense. L’avocat.e doit prendre une décision quant à sa localisation. Iel peut choisir de plaider depuis le tribunal aux côtés des magistrat.e.s, dans quel cas il est fréquent que la communication entre ce.tte dernier.ère et son.a client.e soit compliquée et mène à des réponses bancales. Pour cette raison, la majorité décide de plaider depuis la prison, aux côtés de la personne défendue, une situation toute aussi délicate, car le manque de contact et donc de compréhension avec les magistrat.e.s peut compliquer la défense. Il est aussi possible d’effectuer la défense en duo, de sorte à avoir un pied dans chaque cour et donc avoir de meilleures chances, mais les coûts de cette démarche sont évidemment aux frais du/de la prévenu.e, un poids que peu peuvent se permettre d’assumer41.

La CSDP, quant à elle, admet que si « l’augmentation des délais d’instruction a pu être la source de l’allongement des détention provisoires, c’est la gestion de l’audiencement des affaires, en particulier pour les cours d’assises, qui est depuis le début des années 2010 le point le plus sensible »42. Si, encore une fois, les dossiers des prévenu.e.s sont traités en priorité, les délais d’attente avant l’obtention d’une audience se moyennent entre douze et dix-huit mois43. Ainsi, il est fréquent que la durée passée en détention provisoire double en attente d’une audience. En réponse à cette problématique, le ministère de la Justice introduit, avec la loi de programmation de la justice du 23 mars 2019, et généralise avec la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, la mise en place de « Cours criminelles départementales » (CCD). Ces dernières ont la capacité de juger des personnes accusées de crimes, s’exposant à des peines inférieures ou égales à 20 ans de prison, et ce, sans jurés populaires, mais uniquement en la présence de cinq magistrat.e.s. L’objectif de cette réforme était de réduire les temps d’audience en y faisant participer exclusivement des professionnel.le.s et, de telle manière, augmenter les délais d’obtention d’une audience. Pourtant, très rapidement, il a été déterminé que les CCD ne permettaient pas vraiment de gain de temps : une affaire prend environ 2,23 jours à être traitée en CCD, contrairement à 2,54 jours en cours d’assises44. Ainsi, il est clair que les CCD ne permettent pas de réduire les taux et durées de détention provisoire en permettant des procès plus rapides, puisque la différence ne permet pas ici d’opérer de réels changements. Additionnellement, un manque de moyens se fait une nouvelle fois ressentir. Ne mobilisant pas moins de cinq magistrat.e.s (ce qui est, tout de même, deux de plus que pour une affaire en cour d’assises), il est difficile d’organiser une comparution en CCD. Qui plus est, le déroulement des CCD peut causer, dans certains tribunaux, le retardement des audiences collégiales, justement par manque de moyens. Ces dernières ayant pour but d’adresser les dossiers correctionnels, certaines personnes attendant leur jugement dans le cadre d’un délit voient aussi leur durée de détention provisoire doubler, voire tripler45. Ainsi, malgré les efforts de cette réforme, tout effet positif semble avoir été accompagné d’un effet pervers qui ont collectivement annulé tout avancement que la réforme pouvait apporter.

Une pratique discriminatoire ?

Pire qu’un usage pouvant être considéré comme fréquent, tou.te.s ne sont pas égaux.les face à un potentiel placement en détention provisoire. Ce dernier est supposé être déterminé par la durée de la peine encourue et la susceptibilité à répéter l’infraction commise. Cette pratique est fondamentalement arbitraire, puisqu’une telle décision résulte d’une appréciation personnelle et donc non-absolue des potentiels risques posés par le.a prévenu.e. De plus, les motivations apportées derrière un placement sont fréquemment floues, révélant généralement l’utilisation de critères dits « de façade », plutôt que ceux dictés par la loi. Selon certain.e.s magistrat.e.s, « est-il logique de remettre en liberté une personne alors qu’elle risque de prendre une peine de huit à dix ans d’emprisonnement ? Dans la culture et dans l’opinion, elle doit rester en prison. Ce n’est pas un critère de l’article 144, mais c’est quelque chose qui est plus ou moins ancré dans l’esprit d’un certain nombre de personnes »46. En ce sens, le placement en détention provisoire semble simplement relever de l’opinion publique, avec des décisions justifiées par des motivations bancales, faisant appel à l’explication floue de « mettre fin au trouble exceptionnel et persistant de l’ordre public ». En effet, faisant partie des critères juridiques pouvant donner lieu à de la détention provisoire, il est le sujet d’appréciations très subjectives : « Quand les faits sont très graves, est-ce que la société est prête à accepter que cette personne soit laissée en liberté ? À mon sens, c’est pour ces situations particulières que ce motif existe »47. Pourtant, la loi dicte que cette justification « ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire »48. Nous entrons alors, pour beaucoup de professionnel.le.s, le domaine de « la détention pré-peine »49, soit une punition avant la reconnaissance de culpabilité.

Additionnellement, il est important de noter que la justice française fait en elle-même preuve de discrimination : en 2019, les personnes mises en cause par les forces de l’ordre françaises sont à 82% de nationalité française et à 18% de nationalité étrangère, alors que la population française est composée à 93% de personnes en possession de la nationalité et à seulement 7% de personnes de nationalité étrangère50. Additionnellement, ces personnes étaient à 58% d’origines africaines, tandis qu’iels ne représentent que 43% de l’ensemble des personnes étrangères en France51. Cela se traduit évidemment devant la justice, où une personne étrangère sur quatre écope d’une peine ferme face à un tribunal correctionnel, contre moins d’un.e Français.e sur six52. Assurément, le phénomène est le même face à la détention provisoire : un.e individu.e né.e à l’étranger a cinq fois plus de chance d’être placé.e en détention provisoire53. Plus que des discriminations raciales, la détention provisoire est aussi plus importante pour les personnes sans domicile fixe, pour qui le placement est six fois plus probable54.

Néanmoins, il n’en relève pas nécessairement de discriminations volontaires. Bien que cela ne rende pas la pratique moins biaisée, un placement en détention provisoire peut aussi aboutir d’une incertitude face à la présence de la personne poursuivie en justice lors ses différentes convocations au tribunal. Il est plus spécifiquement question ici des personnes SDF qui ne reçoivent pas forcément lesdites convocations, faute d’endroit où réceptionner le courrier55. Dans un tel cas, il serait alors plus approprié d’effectuer un placement en Centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), des établissements gérés par des associations ou des collectivités publiques locales ayant pour but d’accueillir et d’héberger les personnes en situation précaire56.

Il reste important de souligner que l’appel à la détention provisoire peut aussi transmettre un message fondamentalement politique. En effet, en France, la détention provisoire a été utilisée à répétition particulièrement lors de périodes de forte opposition au pouvoir étatique. C’était notamment le cas face au mouvement des gilets jaunes, une série de manifestations ayant eu lieu entre 2018 et 2019 et cherchant à contester la politique fiscale menée par le gouvernement français. Partout à travers la France, des personnes ne présentant pas d’antécédents de violence ou même d’infraction se voient placées en détention provisoire dans le but de servir d’exemple : c’est le cas, par exemple, de Christophe Dettinger, ancien champion de boxe placé en détention provisoire à la suite d’une manifestation lors de laquelle il s’est violemment interposé entre les forces de l’ordre et des civils après « vu des gendarmes matraqués un jeune homme et une femme au sol »57. Son avocat souligne pourtant le fait que Dettinger ne présente aucune caractéristique pouvant justifier une détention provisoire : marié, employé, et père de famille, il n’avait aucun casier judiciaire pré-existant et ne présentait aucune raison pouvant le pousser à ne pas comparaître lors de son procès58. Il serait possible de n’y voir qu’une coïncidence si la justice française n’avait pas pour habitude d’utiliser la détention provisoire comme outil de l’état d’urgence : des pratiques similaires ont pu être observées dans le cadre des manifestations contre la réforme des retraites en 2023, à la suite de quoi de multiples personnes se sont retrouvées placées en détention provisoire en attente de comparution immédiate59. Plus récemment, dans le contexte des émeutes populaires de 2023 suite au meurtre de Nahel, la détention provisoire a de nouveau été utilisée à outrance, un seul tribunal plaçant pas moins de 28 personnes en détention provisoire ; ce n’est sans compter les 95 personnes ayant été jugées en comparution immédiate et ayant donc pu, avant cela, passer par la case détention60. Sous cet angle, la justice française semble simplement enfermer de manière plus stricte dans le but d’envoyer un message de prévention général, plutôt que de limiter la prévention au contexte unique du procès concerné. 

Quelles alternatives à la détention provisoire ?

La détention provisoire est utilisée à la fois pour garantir la sécurité des personnes impliquées dans l’affaire, mais aussi pour s’assurer que le procès et ses éléments constitutifs ne puissent avoir été faussés. Pour essayer d’en assurer l’exceptionnalité, d’autres mécanismes, ayant pour but d’accomplir les mêmes objectifs, ont été mis en place au fur et à mesure des années. Faisant ses débuts aux côtés de la détention provisoire dans les années 70, c’est notamment le cas du contrôle judiciaire, mis en place par la loi du 17 juillet 1970. Selon ce dispositif, tout.e juge d’instruction ou juge des libertés et de la détention (JLD) peut restreindre les libertés individuelles de toute personne ayant commis une infraction punie par une peine de prison, dans un but de prévention de répétition de ladite infraction. Les restrictions imposées par le placement sous contrôle judiciaire sont multiples et dessinées dans l’article 138 du Code de procédure pénale ; parmi celles-ci, il est possible de compter : la limitation de la liberté de se déplacer, la soumission à des régimes de surveillance médicaux et sécuritaires (comme le « pointage » ou le fait de devoir aller se déclarer en commissariat à fréquence régulière), l’interdiction d’entrer en contact avec certaines personnes spécifiques ou de pratiquer certaines activités, comme celle de conduire61. Le placement sous contrôle judiciaire peut être régi par un cautionnement, système selon lequel la personne concernée devra verser une certaine somme d’argent, fixée par le.a juge. Derrière cette somme, deux justifications : l’indemnisation de la victime en cas de condamnation (en cas de non-condamnation, cette somme serait alors reversée à la personne innocentée) et la garantie du respect des obligations dictée par le contrôle judiciaire (somme à nouveau versée si la personne se plie auxdites obligations)62. Ainsi, même s’il est possible de récupérer l’argent déboursé pour la caution, le contrôle judiciaire reste, fondamentalement, une mesure discriminatoire, par le fait qu’il n’est pas possible pour tout le monde de trouver les fonds nécessaires pour payer la caution pouvant déclencher le mécanisme. Bien que l’arrêt rendu le 5 septembre 1981 par la chambre criminelle de la Cour de Cassation dicte que « le montant et les délais de versement d’un cautionnement […] doivent être décidés, compte tenu des ressources de cet inculpé »63, les montants ne sont pas toujours à portée des individu.e.s concerné.e.s. En plus d’être une option inaccessible pour beaucoup, il est aujourd’hui impossible de dire que le contrôle judiciaire est réellement une alternative à la détention provisoire64. En effet, si en 1999, sur les 61% de personnes en attente de jugement, 21% étaient sous contrôle judiciaire contre 40% en détention provisoire, en 2009, c’est 89% de la population prévenu.e qui était dans cette situation, avec 48% de contrôle judiciaire et 41% de détention provisoire. Ainsi, s’il semble que la proportion de contrôle judiciaire augmente, la proportion de détention provisoire, elle, stagne, et dénonce donc une justice qui s’avère plus sévère, plutôt qu’une justice à la recherche d’amélioration de son système. Par justice plus sévère, il est ici entendu une justice qui a progressivement durci les peines attribuées à des nombreux délits, les rendant souvent éligibles au placement en détention provisoire. Pour illustrer cela, il est intéressant de mentionner le fait que le gouvernement a notamment durci les peines dont une personne est passible à la suite de trafic et vente illégale de cigarettes, auparavant passible d’uniquement un an, mais désormais passible de trois ans65, faisant de la vente illégale de cigarettes un délit dans le cadre duquel il est possible d’être placé.e en détention provisoire.

Une autre possibilité a été introduite avec la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, qui crée l’assignation à résidence avec surveillance électronique (ARSE) comme mesure jumelle de la détention provisoire. Ayant les mêmes objectifs de préservation des conditions idéales pour le projet et le même élément de suppression des libertés, elle présente tout de même l’avantage de ne pas entrer en prison avant son jugement. À nouveau dans les mains des juges d’instruction ou des JLD, elle peut être déployée, avec le consentement de la personne concernée, avant son procès ou à la suite d’un appel après un placement en détention provisoire. Toutefois, tout refus de se plier aux règles encadrant l’ARSE résultera en un placement en détention provisoire. Ces règles concernent majoritairement le contrôle du respect de l’ARSE, généralement faite par vérification téléphonique ou vérification par visite au    domicile66. Néanmoins, les débuts de l’ARSE ont été tumultueux. En effet, il s’agissait d’une mesure applicable au bon vouloir des juges concerné.e.s, ce qui s’est rapidement ressenti : en 2011, seulement 130 personnes étaient sous ARSE, contre 186 personnes en 2012 et 227 en 201367. L’utilisation de l’ARSE ne semble alors même pas représenter une option pouvant réellement être considérée comme alternative, car quasiment jamais utilisée. Plusieurs lois ont eu pour but de limiter l’utilisation de la détention provisoire au profit du déploiement de l’ARSE, comme la loi du 23 mars 2019 de programmation pour la justice ou la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire. Pourtant, ces projets de lois ne s’attaquent pas à la problématique majeure de l’ARSE : elle dépend de l’envie des magistrat.e.s. Or, les magistrat.e.s le soulignent, cette mesure n’est pas souvent déployée par leurs soins, car se rapprochant trop de la détention provisoire et du contrôle judiciaire, et demandant trop de gestion, elle n’est pas identifiée comme une alternative vraisemblablement viable68. De ce fait, leurs décisions sont généralement justifiées par le fait que si l’ARSE représente, à leurs yeux, une possibilité, elle ne représente par la mesure la plus appropriée.

Pour s’attaquer aux hauts taux stagnants de détention provisoire, il paraît donc inutile d’offrir d’autres possibilités puisque l’histoire vérifie l’adage « plus on ouvre de places, plus on enferme ». Ainsi, pour ce faire, la Justice française devrait se pencher davantage sur des questions de dépénalisation. En réduisant le nombre d’infractions pouvant faire l’objet d’une détention provisoire et en augmentant les durées potentielles d’emprisonnement encourues pour pouvoir être détenu.e de manière provisoire, le ministère de la Justice pourrait opérer plus encore de progrès.

L’importance d’un usage exceptionnel

La question de la surpopulation carcérale69 et sa relation à la détention provisoire

En France, le nombre de personnes incarcérées au sein du système pénitentiaire ne cesse d’augmenter (64 405 au 1ᵉʳ mars 2021, 70 246 au 1ᵉʳ mars 2022, et 72 351 au 1ᵉʳ mars 202370). Additionnellement, la surpopulation carcérale reste une des problématiques majeures et les plus urgentes pour les prévenu.e.s français.es, incarcéré.e.s uniquement dans des maisons d’arrêt, les établissements enregistrant les plus hauts taux de surpopulation, avec un taux moyen de 141,3% d’occupation au 1ᵉʳ janvier 202371. Il est alors évident que « la détention provisoire est, dans une très large mesure, à l’origine de la tragique surpopulation carcérale actuelle »72, comme le soulignent de multiples professionnel.le.s du droit. Assurément, les maisons d’arrêt sont peuplées à 40% de prévenu.e.s73, ce qui semble confirmer le fait que l’usage non exceptionnel de la détention provisoire contribue à la surcharge de son système carcéral. Cela ne fait que se confirmer, dès lors qu’il est établi que, sans les 19 919 prévenu.e.s écroué.e.s74 actuellement en France, le seuil de surpopulation carcéral ne serait pas atteint75. Dès lors, les prévenu.e.s doivent évoluer dans certaines des pires conditions de détention de l’entièreté du système pénitentiaire français. L’environnement découlant de la surpopulation carcérale n’est plus un secret : matelas au sol, punaises de lit, rats, matériel sanitaire endommagé, etc.

La situation à laquelle font face les prévenu.e.s incarcéré.e.s est d’autant plus difficile car la surcharge ne concerne pas exclusivement des enjeux d’espace mais aussi de ressources. En effet, les conséquences de la surpopulation carcérale font que les prévenu.e.s sont incapables de répondre aux demandes potentiellement émises par le tribunal et le.a juge concerné.e, demandes parmi lesquelles il est possible de compter une potentielle promesse d’embauche ou des preuves de réinsertion. Le personnel témoigne que la surpopulation en maisons d’arrêt est telle que les conseiller.ère.s pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP) ne sont pas en capacité d’accorder de leur temps aux prévenu.e.s, se concentrant alors entièrement sur ce qu’iels peuvent faire pour elleux. Ainsi, la CGT Insertion-Probation précise qu’il est possible pour beaucoup de prévenu.e.s d’être contraint.e.s à ne pouvoir voir qu’un.e CPIP une à deux fois par an76. Or, ayant, à disposition, peu de ressources et, notamment, n’ayant pas d’accès à internet, il n’est simplement pas possible, pour toute personne en détention, de pouvoir répondre aux demandes parfois exigeantes émises par le.a juge. L’organisation de la défense du procès est alors plus compliquée et donc plus susceptible d’échouer.

Tou.te.s égaux.les face à la justice ?

En l’absence de soutien effectif de la part des CPIP, les prévenu.e.s se retrouvent dans une situation délicate et incertaine quant à leurs perspectives de remise en liberté. En effet, iels doivent alors se reposer entièrement sur leur avocat.e, une personne qui ne travaille pas sur place et qui doit souvent se déplacer d’établissement en établissement pour voir différent.e.s client.e.s. Ainsi, il paraît assez clair qu’un.e avocat.e ne peut pas se dédier au dossier d’un.e seul.e prévenu.e, voire simplement y mettre une priorité. Dans un contexte pareil, certain.e.s se contentent uniquement de transmettre à leurs client.e.s prévenu.e.s une liste des pièces justificatives à regrouper afin d’accomplir la prochaine étape du procès, qu’il s’agisse d’une demande de remise en liberté ou d’un appel. Or, les personnes prévenues ne bénéficiant ni de soutien administratif de la part des CPIP, ni d’accès à internet, et ni de potentielles permissions de sortir, il est impossible pour elleux de regrouper les éléments permettant l’avancement de leur dossier. Ainsi, les prévenu.e.s voient facilement la durée de leur détention provisoire s’étendre de six mois77, faute d’avancement et indépendamment de leur culpabilité, de leur volonté ou de leur investissement dans le dossier.

Il est tout aussi important de souligner que la préparation de la défense rendue plus difficile n’est pas le seul facteur impactant les chances d’un.e prévenu.e d’être reconnu.e comme innocent.e ou, du moins, acquitté.e, comme le souligne ce magistrat français : « Comparaître libre, ça change tout — enfin beaucoup de choses. Vous vous présentez devant un tribunal ou une cour d’assises à priori en meilleure santé, y compris mentale ; vous êtes davantage en capacité d’avoir préparé votre défense ; vous avez la possibilité d’apporter des garanties au tribunal, sur le fait que vous êtes sortis de la délinquance, que vous avez trouvé un travail, etc. »78. Sous cette lumière, il est possible de comprendre l’impact mental qu’un placement en détention provisoire peut avoir sur la santé mentale d’un.e prévenu.e. Le déploiement d’une telle mesure peut donner le sentiment d’une justice biaisée, qui n’accorde pas les mêmes chances à tou.te.s car ne laissant pas les mêmes libertés à tou.te.s. Il devient alors d’autant plus difficile de faire confiance au système judiciaire quant à l’issue du procès.

Qui plus est, il a été déterminé que les courtes peines de prison « ont un effet désocialisant majeur et qu’elles prédisposent à la récidive, ce qu’il faut impérativement éviter »79. Sous ce parapluie de « courtes peines », il est facile d’inclure la détention provisoire, qui relève, en soi, de la condamnation, bien que la durée de cette détention ne doive normalement pas excéder les quatre ans et dure moyennement environ cinq mois80. Cet effet est, sans doute, confirmé par le ministère de la Justice lui-même, qui souligne des taux de récidive moins fort suite à des sanctions non-carcérales81. Or, il est également établi qu’un casier judiciaire pré-existant augmente aussi les chances d’être placé.e en détention provisoire dans le cadre d’une autre affaire82. Une incarcération passée, comme une détention provisoire, augmente aussi par huit les chances de recevoir une peine d’enfermement ferme83. Les prévenu.e.s écroué.e.s entrent alors dans un cercle vicieux, dans lequel la justice ne devient plus si aveugle et donc impartiale et iels n’ont donc plus les mêmes critères de jugement que le reste de la population. Il serait peut-être à nouveau mieux, pour des questions de présomption d’innocence et de justice efficace, de prévoir un placement en CHRS, une mesure déjà utilisée pour les détenu.e.s bénéficiant d’un aménagement de peine. Elle n’est pourtant pas disponible pour les prévenu.e.s, sauf pour certaines catégories prédéfinies (comme, par exemple, les auteur.rice.s de violences conjugales)84, alors qu’elle pourrait permettre d’éviter aux personnes concernées le stigma, à la fois devant la justice et au sein de son entourage, du passage en détention.

Conclusion

Le souci central de la détention provisoire est l’affront qu’il pose à la présomption d’innocence, défendue par l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Il est toutefois délicat de ne pas avoir un tel dispositif en place, car il est parfois nécessaire pour garantir le bon déroulement du procès et la sécurité de toute personne y étant impliquée. Néanmoins, avec un taux d’utilisation s’approchant, lentement mais sûrement, des 30%, il n’est simplement pas possible de considérer qu’il est utilisé de manière exceptionnelle par la Justice française. Cela n’est que confirmé par le fait que d’autres possibilités ne requérant pas de détention existent afin de préserver le procès. Or, bien que celles-ci ne soient pas parfaites, un recours plus important à ces mesures pourrait pousser les législateur.rice.s à mieux en définir les règles. Les justifications officielles derrière l’utilisation de la détention provisoire, même si définies par la loi, sont, en réalité, généralement floues, cachant souvent des décisions à caractère systématiques, se basant sur des raisons discriminantes. Pourtant, l’enjeu d’un usage régulé et bien exceptionnel de la détention provisoire est absolument clef, car son recours excessif pose, aujourd’hui, des problématiques majeures au sein du milieu carcéral. En effet, la détention provisoire contribue allègrement à l’augmentation quasi-quotidienne de la surpopulation carcérale dans les établissements français, contribuant ainsi également à la détérioration des conditions de détention pour tou.te.s. Elle pose aussi un souci majeur pour les prévenu.e.s et leurs opportunités de se détacher du milieu carcéral, en entachant la possibilité d’un procès juste. GROW ne peut qu’exhorter le gouvernement français à prendre des mesures pour renforcer l’idée que la détention provisoire devrait être exceptionnelle, mais aussi pour encourager les pratiques qui vont dans ce sens. Cela se joue davantage dans les arènes politiques et dans les tribunaux, des cercles qui ne se voient pourtant pas affectés par un recours excessif à la détention provisoire et qui ne voient donc pas l’urgence réelle de la situation.

RECOMMANDATIONS 

  • GROW encourage le gouvernement français et son administration pénitentiaire à étudier la problématique persistante de la surpopulation carcérale en y incluant la problématique de la détention provisoire, afin de pouvoir élaborer un plan d’action réfléchi et efficace ;
  • GROW recommande l’augmentation du budget alloué par le ministère de la Justice aux chambres d’instruction à travers la France, dans le but de permettre une justice ayant plus de moyens et étant ainsi moins surchargée et plus efficace, ce qui est sûr de réduire de manière effective les délais de détention provisoire ;
  • GROW promeut le développement davantage de centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), dans l’optique de leur offrir la capacité de recevoir des prévenu.e.s que la justice se doit de surveiller, dans un cadre hors-détention ;
  • GROW conseille la mise en place d’un cadre plus restrictif autour de l’usage de la détention provisoire, en définissant notamment une liste de délits et crimes pouvant y être soumis, au vis-à-vis de la pénalisation plus important de multiples infractions ;
  • GROW encourage également la modification des critères devant être rempli pour qualifier pour un placement en détention provisoire, particulièrement en repoussant des seuils de peines encourues de telle sorte à ce qu’ils soient plus grands, limitant ainsi les infractions pouvant en être l’objet ;
  • GROW réclame la précision du critère « mettre fin au trouble exceptionnel et persistant de l’ordre public » utilisé pour réguler l’usage de la détention provisoire, dont l’utilisation en tant que justification est relativement floue.

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Remerciements

Nous remercions Vannina Bozzi-Robadey, Marie Chapot, Jeanne Delhay, Emilie Delahais, Naomi Ouattara et Amina Touré pour leur relecture.

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Pour citer l’article :

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25 Selon la DAP, est désigné.e comme condamné.e-prévenu.e « toute personne ayant été condamnée définitivement dans une ou plusieurs affaires et prévenue dans une ou plusieurs [autres] affaires ».
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